« Et si une communication à la fois efficace, empreinte de bon sens, qui respecte les utilisateurs, sans accaparer notre temps de communiquant, était possible ? » Voilà ce qui anime Ferréole Lespinasse qui accompagne depuis 2010 des entreprises, des associations et des institutions en refonte éditoriale de site internet, rédaction de contenus et conseils & formation en sobriété éditoriale. Auteure du livre “Sobriété éditoriale : 50 bonnes pratiques pour écoconcevoir vos contenus web » et du blog Cyclop Éditorial, elle nous livre son expérience et ses conseils à la portée de chacun.
« Se positionner sur le tourisme durable et le tourisme responsable invite à scruter à la loupe toutes ses actions pour réduire leur impact. La communication responsable en fait partie : elle touche l’écoconception des supports – qu’ils soient papiers ou numériques – et également les contenus. Travailler la qualité des contenus diffusés, réfléchir à leur rythme de diffusion figure parmi les leviers d’action. »
Aujourd’hui il y a une démesure en communication, tous les projecteurs sont tournés vers le nombre de likes, toute structure est sommée de publier sans cesse pour récolter ces pouces levés. Cette injonction à publier décrétée par un algorithme influe-t-elle réellement les réservations ? Que se passe-t-il si vous publiez moins ?
Et finalement, si vos publics souhaitaient être moins bombardés de messages en tous sens ? Voici la réflexion ouverte par la sobriété éditoriale.
Quelques chiffres pour comprendre
Vous n’en avez pas marre de recevoir des mails et des notifications à tout bout de champ ? D’ailleurs, saviez-vous que 53% des Français souffrent de fatigue informationnelle ?Ou que 77% d’entre eux déclarent qu’ils leur arrivent de limiter ou même de cesser de consulter les informations, dont 27 % régulièrement.
Si l’on compare ces chiffres au succès des contenus auxquels ils sont exposés, il y a de quoi s’étonner.
Ces chiffres nous alertent : pourquoi se surcharger de travail pour répéter ce qui a déjà été produit, sans certitudes d’être lu ni d’avoir un quelconque impact ?
L’approche par la sobriété éditoriale propose un temps d’arrêt sur ces pratiques : ne pas communiquer par habitude ou parce qu’on a toujours fait comme ça et que les autres le font, mais pour apporter une réelle valeur ajoutée.
Une autre idée reçue, c’est le postulat de croire que les publics ont besoin que ça brille et que ça claque de partout. Prenons le très bon exemple du site des Ménuires.
La page d’accueil est très efficace : elle répond à toutes les intentions de recherche lorsqu’on souhaite venir skier, le parcours utilisateur est simplifié pour un temps de chargement minime.
Là où il est nécessaire d’accompagner les chargés de communication et les publics, c’est de s’habituer au juste nécessaire ! À nous communicants d’oser la sobriété pour le bien de nos publics.
Un autre exemple des Oiseaux de passage, une plateforme coopérative qui met en relation habitants, professionnels et voyageurs. En revoyant l’écoconception de leur site, « on a divisé nos données par 4, car 80% des données non structurées ne sont pas utilisées, on est passé de 100 items pour renseigner un voyage à 23, avec une interface plus simple plus agile et paradoxalement mieux référencée » (Prosper Wanner – Extrait de La Feuille de Chou, publiée par Voyageons Autrement, voyage responsable et Tourisme durable)
Car oui, la sobriété fait gagner en efficacité et en qualité, preuve à l’appui !
Faire autrement : la Feuille de Chou
Prenons l’exemple de la Feuille de chou. Ce journal papier est produit par l’équipe du site internet Voyageons autrement, média pionnier dans le tourisme durable.
Imprimé en 60 000 exemplaires, le journal est envoyé à 14 000 structures et plus de 300 journalistes, 50 blogueurs. Des chiffres qui attestent des retombées apportées par la diffusion de ce média.
La diffusion de la Feuille de Chou est originale, car elle repose en partie sur les lecteurs qui en deviennent acteurs. Chacun en devient ambassadeur, car il reçoit 4 exemplaires à diffuser autour de lui. En questionnant le mode de diffusion du message : papier versus numérique, voici une manière élégante de s’affranchir de la dépendance aux GAFAM et aux diktats imposés par le digital.
À nous communicants d’être inventifs !
Passons à l’acte
Arrêtons de faire de la com par habitude, mais parce qu’il y a une réelle valeur ajoutée pour l’internaute et une plus -value par rapport aux objectifs de communication de la structure. Ce qui peut avoir l’heureuse conséquence de réduire la diffusion de contenus, ainsi la charge mentale de l’internaute et la charge de travail du producteur de contenus.
Et si vous testiez ? Chiche !
Avant toute création de contenu, se poser les bonnes questions :
Ai-je vraiment besoin de créer ce nouveau contenu ?
Suis-je légitime sur cette thématique ? Suis-je en accord avec mes valeurs ? Est-ce dans ma ligne éditoriale ?
Y a-t-il d’autres options aussi voire plus efficaces, pour répondre à ce besoin ?
Est-ce le bon moment : Ai-je les ressources internes ? Ai-je le temps de les valoriser ?
Si je décide de produire ce contenu
Je propose un contenu utile pour mes cibles et de qualité 10 fois supérieure à ce qui existe déjà
Je me concentre sur le regard nouveau, la spécificité que je suis le seul à apporter
Il s’agit de scruter ses actions avec des lunettes qui évaluent leur efficacité, au regard de l’utilité du message pour l’internaute ainsi qu’au regard des retombées en communication.
On peut même interroger la nécessité du numérique pour ce message. Selon le message, entre un SMS et un post ou une actu, le SMS peut être plus efficace pour une empreinte énergétique quasi nulle.
1. La clé : la singularité
Travaillez ce qui vous caractérise, ce qui vous rend unique et listez vos forces
Travaillez la valeur que vous apportez à vos clients
2. Connaître les enjeux de ses audiences pour leur apporter un contenu utile
Un contenu utile, comme le montre l’exemple de la page d’accueil du site des Ménuires. Avant toute chose, il s’agit d’informer :
L’internaute apprend quelque chose et trouve une info inédite
Il trouve une solution à son problème
Il avance dans la réflexion qu’il initie avant de consulter le contenu
Il comprend quelque chose qu’il ne comprenait pas avant, par exemple avec une vidéo ou une infographie
3. Penser le cycle de vie de son contenu
Dès la création du contenu, je pense à sa diffusion, à sa rediffusion pour optimiser ce contenu. J’intègre également sa mise à jour et sa suppression. À quoi sert une vidéo de 3 ans ? Est-elle toujours pertinente ?
4. Raisonner son rythme de diffusion
Faites des tests ? Réduisez la diffusion de vos newsletters et jaugez l’impact. Prenons l’exemple du magasin Satoriz a réduit ses newsletters de 2/mois à 1 mensuelle. Cela n’a changé ni le taux d’ouverture des newsletters ni la fréquentation en magasin.
Réduisez vos posts réseaux sociaux. Conservez ceux qui sont utiles et pertinents pour vos usagers. Bien sûr, les algorithmes peuvent faire baisser le nombre de vues. Mais quel impact réel sur vos réservations ? Tentez !
5. Changer ses indicateurs de mesure
Imaginons un tableau de pilotage corrélant le succès de la publication et son empreinte carbone ou encore le temps de lecture à l’égard de son utilité. Et pourquoi pas mesurer le moins de posts, de pages, de vidéos, d’heures de travail.
Transformons la communication
En conclusion de cet article, mener une politique de tourisme durable passe également par la mise en place d’une communication responsable. C’est la clé pour incarner ses propos dans les moindres détails. La sobriété éditoriale s’inscrit dans le prolongement de la stratégie de communication. La démarche est de remettre en cause ses actions de communication faites jusque là, pour leur faire gagner en pertinence. C’est aussi l’opportunité de mener une réflexion sur l’adéquation de sa communication avec les valeurs de sa structure pour une prise de parole plus engagée et plus sincère.
😉 Et l’article que vous venez de lire ?
Son contenu
C’est un article qui propose du contenu à long terme qui ne présente pas de caractère de péremption rapide c’est pourquoi il restera accessible sur le blog de trajectoires Tourisme
L’article ne contient pas d’éléments de poids numérique important
Nous espérons qu’il aidera à sensibiliser à l’intérêt de faire autrement !
Son mode de préparation
Il a été produit avec des échanges par téléphone et en télétravail. Il n’a pas engendré de déplacements carbonés.
Pour aller plus loin
Pour continuer à explorer les pistes citées dans cet article :
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